Pacte Entreprise : le plagiat, c’est maintenant

Des opposants politiques et même certains députés de la majorité socialiste reprochent à François Hollande d’avoir repompé sans vergogne le dernier programme électoral de Nicolas Sarkozy (2012). Point de vue.

Social démocrate François Hollande ? Il l’a avoué du bout des lèvres, mardi soir, lors de sa conférence presse. Mais la vérité est ailleurs : comme Sarkozy, Hollande se réclame désormais de l’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder (1998-2005), l’homme qui, malgré son positionnement au centre-gauche (SPD), mit en œuvre au début des années 2000 le désormais fameux agenda 2010, une pochette surprise de réformes libérales visant à assouplir, outre-Rhin, le marché de l’emploi et baisser le coût du travail par une refonte brutale de l’Etat Providence.

Tournant libéral à la Delors ?

Si François Hollande assume désormais cette ligne, c’est qu’en réalité il a toujours été prédisposé à la suivre. En bon fils spirituel de Jacques Delors (PS), chantre du tournant libéral de 1983, Hollande n’a jamais été un socialiste pur-sang. Seulement, en France, pour gagner l’alternance à gauche (comme en 1981, 1997 et 2012), il faut opportunément maîtriser la langue de Jaurès, prendre au besoin l’accent de Léon Blum, bref savoir parler « socialisme » et, quand les circonstances politiques l’exigent, insuffler dans ses discours des intonations orthodoxes.

Inspiré par le Mitterrand de 1981, Hollande s’est engouffré dans cette brèche en 2012. La bataille électorale qui l’opposait au président UMP, partisan assumé d’un plan Schröder à la française (quoi qu’avec cinq ans de retard), ne lui donnait d’autres choix que de se déporter à gauche. C’est ce qu’il avait fait, dans le feu de la campagne, en se posant en ennemi n°1 du « monde de la Finance » (discours du Bourget). Pour les électeurs qui ont cru à cette réclame, la conférence de presse élyséenne du 14 janvier dernier s’est révélée comme une réplique amère de la « journée des dupes ».

Les deux seules mesures de gauche consenties par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault furent, dès le printemps 2012, un coup de pouce, minime, au SMIC (+0,6%) et la revalorisation de l’Allocation de rentrée scolaire. S’il a enterré le projet de TVA sociale de Sarkozy, c’était pour ressortir, deux mois plus tard, un Crédit d’Impôt Compétitivité-Emploi (CICE) de 20 milliards d’euros, lui aussi financé par…la TVA. Mais la première vraie rupture avec l’école socialiste est intervenue début 2013 lorsque les partenaires sociaux sont parvenus à conclure un accord national interprofessionnel (ANI) donnant la prime à la négociation dans les entreprises sur des questions aussi primordiales que le temps de travail, comme l’avait réclamé Sarkozy en son temps, mais sans avoir le courage de le faire.

Baisse du coût du Travail

Le travail de sape libéral de François Hollande s’est poursuivi, petit à petit, jusqu’à atteindre son acmé mardi dernier, jour de gloire pour le pacte de responsabilité avec les entreprises, dont la principale mesure a été dévoilée en grande pompe : une baisse massive du coût du travail par le transfert des cotisations familiales, aujourd’hui supportées à hauteur de 35 milliards d’euros par les employeurs.  Quel mécanisme prendra le relais pour financer cette grosse manne sociale ? Rien, visiblement, n’a été fixé mais les ménages auront du mal à échapper à une hausse, quasi inévitable, de la CSG.

Comme l’a dit Hollande, ce n’est pas une relance par la demande qu’il faut engager mais une « relance par l’offre », rompant ainsi avec le paradigme keynesien qui avait fait le lit de la victoire du parti socialiste en 1981. Avant que le tournant de la rigueur, impulsé par Jacques Delors, ne le conduise tout droit vers ses plus cuisantes défaites électorales (1986 et 1993).

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